En attendant
“Gémeaux ascendant je ne sais quoi : adore tout contrôler”. Ça doit être sans aucun doute mon horoscope si les planètes s’alignaient vraiment. Mais ces jours-ci, justement, je ne peux rien contrôler. Car ces jours-ci, j’attends un signe, un SMS, un réveil dans la nuit, l’instant où Camille me dira “je crois que ça y est”. À ce moment-là, on partira à la maternité et ce sera la fin. La fin de ce mini-void dans lequel on vit depuis l’entrée dans le neuvième mois. Et la fin du reste. La fin d’exister pour moi-même.
Dans quelques jours, je serai papa d’une petite fille, toute petite, belle comme le jour. Oui je sais déjà qu’elle sera belle, je lui ai demandé et elle a donné deux coups de pieds, ou de mains, preuve d’une vérité inaltérable. J’exagère, mais je le sais déjà, point. En attendant son arrivée, les jours s’allongent, avec une routine comme une préparation à ne plus en avoir du tout. Boire le café du matin, longtemps, cuisiner le dîner dès 17 heures en discutant, emporter l’ordi au lit à 22h30 pour “un dernier épisode” d’Only Murders in The Building quand Camille en a marre de rouler dans le canapé à la recherche d’une position un brin confortable.
Et la fin du reste ? Plutôt le début d’un nouveau chapitre, car à part arrêter de découvrir de la musique si j’en crois le Guardian, l’arrivée d’un enfant dans ma fin de trentaine est un choix chéri et réfléchi, une nouvelle brique logique pour nous, le tout dans un monde qui pourtant ne demande rien de tout ça. Alors on fera au mieux, du petit au grand geste, pour grandir doucement et tendrement sans imposer nos visions privilégiées et égocentriques du monde ; mais en partageant nos doutes et nos savoirs comme autant de vœux pieux et vains.
Il faudra écrire une histoire, une vie entière, en être le personnage principal. Ce sera dur, comme le monde, ce sera triste, comme la vie, et peut-être que ce sera beau, même si c’est seulement le temps de quelques instants. Instants qui suffisent à justifier l’existence. En attendant de pouvoir vivre cette existence, ma fille, je te donnerai la mienne, en amour et en patience, la même que celle avec laquelle on t’attend aujourd’hui. Prends ton temps, le monde est prêt à te rencontrer mais sait déjà que tu vas grandir trop vite.
PS : si tu ne ranges pas ton étagère Montessori je te lirais cette newsletter en boucle à la place des aventures de Peppa Pig.